LA MAISON
Je suis passionnée par les hommes bleus depuis mon enfance, sans raison apparente puisque je suis de culture Française par ma maman et Suisse par mon papa, guide de haute montagne. Le point commun est peut-être là... La montagne !
Un beau jour, je m'envole pour découvrir cette terre avec mon mari et nos cinq enfants ! Nous passons deux semaines à l'aventure et visitons le sud du Maroc depuis Marrakech. Gorges, vallées, oasis, désert, kasbahs, tout est magique ! Une vie pas comme les autres... J'en tombe amoureuse et emporte avec moi des fragments de leur vie... Tajin, épices, amphore à Tanjia, lampes, babouches etc. Et bien entendu un tapis Berbère ! Mon premier tapis Berbère ! Quelque chose que je chéris... d'une valeur inestimable !
Sous le charme de ce pays et de son artisanat, je ne peux garder ce trésor pour moi et décide de partager ma passion... Une relation privilégiée se tisse ainsi avec le Maroc et plus exactement avec les habitants de la montagne, le peuple Berbère. Ces femmes si courageuses, belles et souriantes me fascinent ! Je cuisine et fait cuire le pain avec elles, les regarde tisser leurs œuvres avec admiration. A force je décide de faire de ma passion, mon métier.
C’est la naissance de Mandana en terre Nomade !
PORTRAIT D'AÏCHA
Tisseuse de Tazenakht
Nous avons rencontré Aïcha dans la région de Tazenakht. Agée aujourd’hui de 50 ans, elle est née dans une famille pauvre. N’ayant pas la chance de pouvoir aller à l’école, elle a aidé sa mère dans le dur travail de la maison depuis son plus jeune âge.
Lorsqu’elle s’est mariée, son mari ne travaillant que rarement, du fait du manque d’emplois dans cette région désertique, Aïcha s’est retrouvée avec la responsabilité de subvenir aux besoins de la famille. Le seul travail accessible aux femmes à Taznakht c’est le filage de la laine puis le tissage des tapis. Elle a eu 3 filles et 1 garçon, avec toutes les responsabilités que cela implique. Elle a transmis son savoir-faire à ses filles qui l’aident aujourd’hui dans le filage et le tissage. Peu bavarde sur sa vie quotidienne, par pudeur, elle aime par contre partager la passion qui anime sa vie et ses aspirations : le tissage des tapis.
Aïcha nous parle de son travail…
« Notre travail est généralement comme un miroir qui reflète nos sentiments, nos ambitions, l’optimisme, mais aussi l’amour ou l’angoisse liés à une vie faite d’incertitudes, d’espoirs et de joies. C’est un travail qui vient du cœur et que l’on fait par amour des belles choses, du partage de notre culture et de notre savoir-faire ancestral. Nous sommes fières lorsque nous pensons que nos tapis plaisent et vont dans de belles maisons ou appartements un peu partout dans le monde ! »
Dans un élan de partage, elle nous dévoile un peu plus sa vie…
« Sinon regardez nos mains blessées, elles peuvent tout dire et vous montrer la difficulté de tisser les tapis avec ce matériel. Mais on peut tout supporter, que ce soit les effets des fils ou de la fatigue afin de nourrir nos enfants, de leur acheter ce dont ils ont besoin, comme des vêtements, chaussures, et parfois des petits cadeaux... Il arrive qu’ils nous supplient de leur acheter quelque-chose, mais comme on n’en a pas les moyens, on leur demande d’attendre qu’un tapis soit terminé et vendu. Oui je suis obligée de travailler dans la mesure où mon mari n’arrive pas à trouver de travail parce qu’il n’y a ni usine ni entreprise ni agriculture dans notre région. Le seul moyen qui nous permette de vivre est le tissage des tapis. »
En fonction de sa dimension, une tisseuse met un à trois mois pour tisser un tapis…
Traduit du Berbère par Radouan Choukri
